La loi Macron, c'est aussi... la fin du droit du travail (fiche N°1)

Le droit du travail est un droit d'exception au droit civil. Là où le droit civil repose, dans le cadre du règlement des conflits, sur l'idée d'une égalité entre les parties, le droit du travail, au contraire, reconnaît le lien de subordination hiérarchique du salarié à l'employeur. Cette subordination, créatrice d'obligations pour les salariés, est également créatrice de droits spécifiques pour les salariés et d'obligations pour les employeurs afin de répondre à cette situation qui ne respecte pas les présupposés ordinaires du droit civil. Le Code du Travail réunit notamment ces droits. Loin d'être la somme monumentale et le carcan de l'activité dénoncé par les libéraux, le Code du Travail est, en volume, l'un des plus réduits du droit français, ce qui ne veut pas dire pour autant qu'il est sans impact sur la vie quotidienne, au contraire : pour vingt-quatre millions de salariés, son incidence est directe et fondamentale !

Le MEDEF en a conscience, lui qui milite ouvertement depuis sa création, et comme le CNPF avant lui, sur deux fronts : la baisse du nombre des normes du Code du Travail (encore une fois bien moins nombreuses que dans les autres codes du droit français), et le remplacement de la relation de subordination hiérarchique du salarié à l'employeur par une "soumission volontaire" du salarié à l'employeur.

Que veut dire cette expression de "soumission volontaire" ? Que les salariés obéissent à leur patron non pas parce qu'ils y sont obligés, mais parce qu'ils le veulent. C'est évidemment une aberration, les conséquences d'une non obéissance à l'employeur étant fort logiquement, pour les salariés, une sanction voire une perte d'emploi. Mais cette fiction permettrait de faire croire qu'entre employeurs et salariés, il y a une complète égalité de situation lors de la conclusion de contrats. Et ainsi, les contrats de travail seraient soumis aux mêmes conditions que n'importe quel contrat de pair à pair du droit civil.

Par exemple, si aujourd'hui les modifications qui peuvent être apportées à un contrat de travail déjà signé sont limitées en nombre et en impact, avec le passage à la "soumission volontaire", un contrat de travail pourrait être modifié autant de fois que désiré et sans limitation quant aux modifications apportées. Quelle égalité entre employeur et salarié si l'alternative se fait entre imposer des conditions de travail indignes et rompre purement et simplement le contrat, c'est-à-dire perdre son emploi ?

Bien évidemment, il ne s'agit pas de dire que tous les patrons profiteraient ainsi de cette situation pour commettre de tels abus. Mais ces pratiques existent d'ores et déjà, et remplacer la domination hiérarchique de l'employeur sur le salarié par une "soumission volontaire" du salarié à l'employeur permettrait à ceux des patrons qui ne se mouchent pas de scrupules de les poursuivre sans le moindre ennui.

Or, vous l'avez compris, cette casse de la spécificité fondamentale du droit du travail est contenue dans le projet de loi Macron. En effet, il propose de revenir sur l'article 2064 du Code Civil, celui qui prévoit que les règlements des conflits relatifs au contrat de travail ne dépendent pas du Code Civil mais du Code du Travail, c'est-à-dire de faire du contrat de travail un contrat comme les autres, entre parties supposées "égales". Le rêve du MEDEF.

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